yA la lecture des documents de la consultation publique, on s’aperçoit que le demandeur de l’autorisation d’épandage des boues d’épuration est le maire de la ville de Bailly, où est située la station d’épuration. M. Jamati est président d’Hydreaulys, syndicat des eaux des plusieurs communes des Yvelines. Le dossier a été réalisé par Suez et Véolia. Ces entreprises promeuvent par ailleurs sur leur site internet la solution de réutilisation des boues d’épuration ou de traitement des boues
Si la démarche est louable dans le cadre d’une utilisation sous forme de biogaz, l’épandage des boues est plus problématique lorsqu’il s’agit d’utiliser cette matière dans la filière agricole en vue d’engrais, notamment lorsque le stockage des boues n’est pas réalisée correctement.
Le syndicat mixte Hydreaulys, utilise donc 2 acteurs privés pour promouvoir la réutilisation de sous produits d’épuration avec comme objectif l’épandage total des onze mille tonnes de matière brutes générées par la station sur près de 4000 hectares.
La siccité des boues est supérieure à 25% après traitement à la chaux, ce qui signifie que 75% des boues ne sont pas complètement sèches et on peut donc s’interroger sur les composés volatiles qui seront dégagés lorsque ces boues seront disposées en tête de parcelle, en pleine chaleur durant l’été ou bien lors d’épisodes pluvieux qui vont donc faire pénétrer ces boues dans les sols.
Des prélèvements effectués en 2017 et qui servent d’éléments de contrôle démontrent la présence de trace de métaux lourds et autres composés chimiques comme les PCB. Bien sûr, les résultats sont inférieurs aux valeurs maximales. Le problème est qu’un échantillon n’est pas représentatif de l’ensemble et de l’évolution des différents dépôts industriels dans le temps. Suez et Véolia contrôlent a priori les émissions dans leur processus et considèrent qu’il n’y a pas de risque tant que les procédés de stockage sont respectés.
Par ailleurs les rejets industriels dans la station sont a priori limités et encadrés par une convention avec chaque entreprise ou établissement public. On compte parmi les conventions des cabinets dentaires, un établissement hospitalier pour personnes en situation de handicap, mais aussi un garage et une structure militaire. Une pollution lente des sols, fertilisés avec des déchets chimiques n’est donc pas à exclure et l’entreposage en bout de parcelle et les conditions d’épandage présentent donc des risques soit disant contrôlés. Un principe de précaution devrait s’appliquer puisque le risque zéro n’existe pas. C’est bien le problème.
Le stockage des boues sur le site d’épuration sera en effet d’un mois et demi, puis de quatre mois et demi sur la plateforme délocalisée de Flacourt. Deux autres sites complémentaires sont envisagées pour stocker ces boues sur 3000 m2. Les boues seront ensuite disposées chez les 29 agriculteurs partenaires, en tête de parcelle, de mars à septembre « si les conditions le permettent ».
Les conditions d’entreposage des boues sont définies par l’article 5 de l’arrêté du 8 janvier 1988 fixant les prescriptions techniques applicables aux épandages de boues sur les sols agricoles pris en application du décret n° 97-1133 du 08/12/97 relatif à l’épandage des boues issues du traitement des eaux usées :
Article 5 de l’arrêté du 8 janvier 1998
Les ouvrages d’entreposage de boues sont dimensionnés pour faire face aux périodes où l’épandage est impossible. Ils sont conçus pour retenir les lixiviats générés au cours de la période d’entreposage. L’implantation des ouvrages d’entreposage, dépôts temporaires et dépôts de transit, leur conception et leur exploitation minimisent les émissions d’odeur perceptibles pour le
voisinage, notamment lors des phases d’apport et de reprise des boues.
Le dépôt temporaire de boues, sur les parcelles d’épandage et sans travaux d’aménagement, n’est autorisé que lorsque les quatre conditions suivantes sont simultanément remplies :
a) Les boues sont solides et stabilisées; à défaut, la durée maximale du dépôt est inférieure à quarante-huit heures ;
b) Toutes les précautions ont été prises pour éviter une percolation rapide vers les eaux superficielles ou souterraines ou tout ruissellement ;
c) Le dépôt respecte les distances minimales d’isolement définies pour l’épandage par l’article 13 ainsi qu’une distance d’au moins 3 mètres vis-à-vis des routes et fossés ;
d) Seules sont entreposées les quantités de boues nécessaires à la période d’épandage considérée. Cette quatrième condition n’est pas applicable aux boues hygiénisées.
Or les boues d’épandage sont d’ores et déjà visibles aux abords de certains champs depuis la route, sans respect des préconisations précédentes. La voie empruntée par Véolia et Suez pour le compte d’Hydreaulys est légale car il s’agit de demander une autorisation d’épandage de déchets sur des terres agricoles une fois que les risques associés sont maîtrisés. Des intérêts économiques sont en jeu, car la concentration urbaine rend le stockage de ces déchets problématiques pour les opérateurs et les collectivités locales qui doivent s’occuper de leur traitement.
Est-ce que ces intérêts économiques priment la santé des habitants des zones rurales, et des animaux qui y vivent? Il faudra surveiller de près ce dossier pour défendre notre qualité de vie et éviter que les campagnes deviennent le dépotoir à ciel ouvert des zones urbanisées. D’autres solutions sont possibles pour recycler ces déchets.